Chaque Zouhri a, au moins une fois dans sa vie, fait l’expérience de rêves peuplés de djinns, de démons ou de l'Antéchrist, qu'il en ait été conscient ou non. Il est crucial de bien comprendre ces visions oniriques, qui peuvent parfois être troublantes ou effrayantes. Par ailleurs, certains Zouhri sont capables de percevoir ces entités à différents moments de la journée, non seulement en rêve, mais aussi dans la réalité. Cependant, sachez que toutes ces entités ne vous veulent pas nécessairement du mal : certaines sont même bienveillantes et œuvrent à vos côtés. Nous allons donc nous pencher sur ce sujet méconnu qu’est le royaume des djinns et la diversité de ses habitants, afin d'éclaircir, au moins partiellement, ce mystère.
Lorsque nous évoquons la Reine Verte, il s'agit en réalité d'Al-Hajjah, la pieuse. Cette entité ne doit pas être confondue avec une reine ordinaire ; elle est l'incarnation d'un pouvoir surnaturel au sein des djinns musulmans. Seule souveraine d'une élite de djinns volants, elle règne sur les plus puissants de leur espèce.
Les djinns volants, souvent rois ou tyrans, doivent leur nom à leur capacité à se doter d'ailes et à se métamorphoser en faucons, pigeons ou huppes. Cette faculté de transformation en oiseaux est l'un des signes les plus éclatants de leur puissance. La majorité de ces djinns volants sont des souverains redoutés, détenant des pouvoirs hors du commun.
Même les ifrits, des djinns d'une nature plus puissante, possèdent des ailes et peuvent voler. Parmi eux, on trouve les djinns volants et les djinns verts, qui appartiennent au royaume divin — une dimension s'étendant du Mont de la Lumière jusqu'à La Mecque, en traversant les montagnes de Tihama. Ces entités spirituelles résident dans les lieux saints de La Mecque et de Médine, sous l'autorité suprême de Mawlaya Ahmed al-Makki, dont le nom fait référence à La Mecque elle-même.
Reconnu sous le nom de faqih Ahmed (le juriste religieux), Mawlaya Ahmed al-Makki n'a aucun lien avec les souverains des jours, ces entités qui règnent sur les sept jours de la semaine ou qui protègent les rituels. Il occupe cependant une place éminente dans le royaume divin, appartenant à un cercle de pieux élus. Ce royaume, invisible aux humains, est peuplé par les serviteurs fidèles de Dieu. Djinn dévot et ascète, Mawlaya Ahmed al-Makki provient du peuple du souvenir et de la prière, un être entièrement voué à la dévotion divine.
Le "Cercle des Pieux" est évoqué dans le Coran sous l'expression énigmatique des "confins de la ville". Dieu Tout-Puissant déclare : « Et un homme vint des confins de la ville en courant. » Mais cette ville n'appartient pas à notre réalité physique ; elle se situe dans une autre dimension, un royaume réservé aux serviteurs pieux. C'est une terre mystérieuse, comparable à celle des martyrs dont il est dit : « Ne pensez pas que ceux qui ont été tués dans le chemin de Dieu sont morts ; au contraire, ils sont vivants auprès de leur Seigneur, recevant leur subsistance. »
Dans ce monde parallèle, appelé la "Terre des Martyrs", s'étendent quarante terres adjacentes, invisibles à nos yeux terrestres, car Dieu Tout-Puissant nous a avertis : « Nous avons placé devant eux un obstacle et derrière eux un obstacle, et Nous les avons enveloppés, de sorte qu'ils ne peuvent pas voir. » Ô assemblée des djinns et des hommes, si vous êtes en mesure de franchir les limites des cieux et de la terre, tentez donc de le faire ! Mais sachez que vous ne le pourrez qu'avec l'autorité du tout puissant.
Les rois des djinns verts obéissent à leur propre souverain, mais les descendants d'Ahmed al-Mahdi sont reconnus comme les maîtres du secours divin, orchestrant les interventions célestes. Parmi eux, Hajja Malika, fille d'Ahmed al-Mahdi, occupe une place singulière. Vénérée par les rois de Nubie, elle est particulièrement honorée par Shammar, le roi du jeudi, et Abdallah al-Abyad, le roi du vendredi. Ces deux rois, frères et héritiers d'un roi pieux, la considèrent comme leur propre fille. Tous appartiennent au cercle des Justes, résidant dans la Terre des Justes, un royaume caché par la volonté divine.
Ainsi, Hajja Malika al-Khadra est connue sous le nom de « Fille des Rois ». Aucun ifrit, aussi puissant ou malveillant soit-il, n'ose lui nuire ni franchir les frontières de son domaine. Elle est reconnue comme la grande reine céleste, dont la pureté et la noblesse surpassent celles de toutes les autres filles des rois djinns. Capable de voler, certains la surnomment « Hajja Malika céleste », non à cause de la couleur bleue, mais pour sa capacité à s'élever dans les cieux. Lorsqu’on parle d’elle, on évoque aussi la « maîtresse du chameau blanc », un symbole de son pouvoir et de sa majesté inégalée.
Vêtue d'une somptueuse robe de soie verte royale, brodée d'or et sertie de joyaux, imprégnée des envoûtants parfums d'oud, d'ambre et de musc, elle traverse les voiles de l'invisible pour pénétrer dans notre monde terrestre à des moments précis. Chaque lundi et jeudi, à l'aube, elle descend avec sa suite, notamment la mère Zaynab, la reine des rois, et ce, jusqu'à l'appel de la prière du midi. Par la grâce divine, elles dissipent les ténèbres qui enveloppent les esprits inférieurs tourmentant les enfants des hommes, libérant ainsi les victimes de la sorcellerie, qu'elle soit œuvre des démons humains ou des djinns. Leur descente céleste vise à rétablir la justice et à chasser ces esprits errants qui troublent la terre.
Le mercredi et le vendredi, elles descendent également, mais cette fois après la prière de l'après-midi, jusqu'au coucher du soleil, vêtues de violet. Le mercredi est principalement dédié à la piété et à la diffusion d’encens, car c’est ce jour-là que se tiennent les assemblées de dhikr. À ce moment, la porte de la Présence leur est ouverte, et elles sont enveloppées dans les effluves des parfums sacrés.
Il est important de noter que Hajja Malika, reine spirituelle, apparaît deux fois : les lundis et jeudis, habillée de vert, et les mercredis et vendredis, vêtue de violet. En conséquence, de nombreux esprits terrestres se dissimulent sous le nom de la reine, prétendant être elle, alors qu'ils n'ont aucun lien avec cette entité spirituelle. Il y a aussi des démons qui possèdent des individus et, lors de rituels d'exorcisme ou lorsque le Coran est récité, ces esprits inférieurs se manifestent sous le nom de "Malika".
Cependant, ces êtres n'ont rien à voir avec la véritable "Malika". Celle-ci ne prend jamais possession des corps, ne cause aucun mal et ne pratique pas la sorcellerie. De plus, les sorciers et les jinns n'ont aucun contrôle sur elle. Par conséquent, toute personne qui prétend être en contact avec un esprit ou une spiritualité doit savoir avec certitude avec qui elle communique. En effet, une confusion à ce sujet peut provoquer des troubles physiques et entraîner divers blocages.
Il est fréquent qu'une personne touchée par un djinn ou victime d'un sortilège soit trompée, pensant entretenir une relation avec un esprit bienveillant. Le djinn peut lui murmurer : « Je suis un roi, à ton service, un de tes protecteurs. » À partir de ce moment, beaucoup se mettent à offrir des sacrifices et à fréquenter des sanctuaires, convaincus qu'ils rendent hommage à cet esprit ou ce roi. Ils affirment alors : « Je fais ces offrandes pour que mes vœux soient exaucés. »
Cependant, en réalité, ces actions ne font que renforcer leur lien avec le djinn qui les accompagne. Ce dernier, qu'il soit le fruit d'un sortilège ou d'une malédiction, gagne en puissance au point de dominer leur existence. Il finit par prendre le contrôle de leur corps et de leurs actions. Je mets en garde contre ces méprises dans le domaine spirituel, notamment en ce qui concerne certains lieux liés à des figures telles que la Hajja Malika, qui peuvent exacerber ces confusions.
Certains démons, issus des sectes des 'Rouges' ou des 'Sabatiens', se font passer pour des esprits bienveillants en usurpant l'identité de Malika. Ils se manifestent à travers l'utilisation d'encens, de parfums et d'offrandes spécifiques, apparaissant après la prière du soir et jusqu'à l'aube. Pourtant, ce créneau horaire n'est pas propice à la véritable descente de Malika. Ces entités, vêtues de violet ou de rose, se révèlent habituellement les mardis et samedis, mais ce ne sont en réalité que des imposteurs démoniaques sans aucun lien avec elle.
Trompant les hommes par des promesses fallacieuses de richesses et de biens matériels, ils les entraînent dans des pratiques douteuses comme le tabagisme, la consommation d'alcool et autres excès. Ceux qui concluent des pactes avec eux finissent par tout perdre, et lorsqu'ils cherchent à rompre ces accords, ils se heurtent à la punition et à la persécution.
Ce sujet est d'une grande sensibilité et requiert une approche empreinte de prudence. Si l'un de nos frères ou sœurs se trouve lié par un pacte, qu'il soit avec un djinn ou un roi terrestre, et désire s'en affranchir, il est impératif de solliciter l'aide de personnes compétentes et expérimentées avant d'envisager toute confrontation directe. Comme le rappelle un sage proverbe marocain : "Une seule abeille vaut mieux qu'une ruche pleine de mouches.”
Aïcha, la Divine Reine des Djinns
Passons maintenant à l'évocation de deux des reines les plus célèbres parmi les djinns noirs du Maroc. La première est un esprit, tandis que la seconde incarne une force plus obscure et inférieure. La reine Aïcha, souvent est bien connue pour être un esprit lumineux et bienveillant. En tant que sœur aînée des filles de l'Akhal, elle incarne la sagesse et la lumière. À l'opposé, sa sœur cadette, un esprit rebelle et insaisissable, ne se soumet à aucune religion ni croyance. Changeante et difficile à maîtriser, elle règne sur des énergies sombres et sulfureuses.
Aïcha, est un esprit dont le nom a été choisi par son maître humain, Sidi Ali Ben Hamdouch. Nombreux sont ceux, parmi les enfants et descendants de nobles, qui l'appellent "Al-Mima". Certains la voient en rêve, d'autres la perçoivent en pleine conscience, sans l'ombre d'un doute. Aïcha suit un chemin spécifique, avec ses propres règles, symboles, chiffres, serments, ainsi qu'une table et une balance métaphysiques. Ces expériences n'ont rien à voir avec des troubles mentaux, des hallucinations ou des délires. Si quelqu'un affirme avoir vu Aïcha, alors il l'a vue, point final.
Ce n'est pas à nous de lui dire : "Non, tu es fou ou stupide". La science moderne peut rejeter ces phénomènes, mais est-ce vraiment cela la science ? La science spirituelle fonctionne sur des principes différents, bien au-delà de ce que l'esprit humain peut saisir. Les esprits rationalistes pourraient penser que ceux qui vivent ces expériences sont mentalement déséquilibrés. Ils affirmeront : "Celui qui voit ces choses souffre d'un trouble psychologique", et commenceront à donner des conseils : "Va voir un médecin, prends des sédatifs, fais des séances de neurologie", et ainsi de suite.
Aïcha n'est pas seulement une figure légendaire au Maroc ; sa renommée s'étend bien au-delà, des montagnes de l'Atlas jusqu'à celles d'Ispahan, et du nord de l'Afrique jusqu'aux confins du Soudan. Ceux qui l’ont rencontrée la décrivent souvent sous l'apparence d'une femme âgée. Elle se manifeste ainsi : une femme à la peau sombre ou cuivrée, aux cheveux grisonnants teints au henné, habituellement vêtue de vert ou de blanc. Sa tenue et son apparence varient selon l'énergie de la personne avec laquelle elle entre en contact.
Elle incarne la dignité, la sincérité et la loyauté, avec un cœur empli de bonté. Cette entité terrestre spirituelle est profondément attachée à la mémoire de Dieu, au chant du Coran et à la récitation des louanges sacrées. Portant un chapelet noir et une prière en soie blanche, elle chérit la pureté, la piété et la justice, des valeurs qu’elle honore dans chacun de ses gestes. Elle apprécie particulièrement les offrandes, qui font partie de son rituel.
Son henné est préparé avec soin, mêlant lavande écrasée, bois de santal et diverses résines d’encens — le jâwî rouge, blanc et noir — broyées ensemble avant d’être appliquées. Ce henné, unique, est dessiné en points, entre sept et dix-neuf selon l’énergie spirituelle de celui ou celle qui le reçoit. Les reines, issues de la lignée d'Akhal, sont deux : l'une est pure et bienveillante, tandis que l'autre, appelée Aïcha ou Aouicha, est une entité inférieure et rebelle. Vêtue de noir, parsemée de cercles blancs, son visage reste caché, ajoutant une aura de mystère à sa présence.
Elle incarne à la fois la fatigue et la souffrance. Les sages de cet art la désignent sous le nom de "fille de Kajo", car elle règne sur les djinns noirs, étendant son pouvoir d’Akrash, dans la vallée d’Abu Raqraq à Rabat, jusqu’au mont Kajo à Salé. Rapide et énigmatique, elle est bien connue parmi les voyantes et les sorcières. Étrangement, elle semble avoir une affinité particulière avec ceux qui souffrent de folie ou de troubles mentaux, devenant leur alliée invisible et se manifestant à eux fréquemment.
Elle se dissimule souvent sous des apparences trompeuses, vêtue de blanc, avec un voile noir dissimulant son visage. Cependant, elle n’a aucune connexion avec ceux qui manipulent le verre, ces derniers étant les enfants du Khalife, œuvrant dans la lumière, tandis qu'Aouicha opère dans l’ombre.
Elle ne peut manipuler le verre qu'à l'abri de la lumière qu'elle déteste, une lumière qui semble la consumer. Contrairement aux véritables enfants du Khalife, incapables de se mouvoir dans l’ombre, l’enfant d'Aouicha Khalifia trace sa route à travers un chemin rude et douloureux, semant la souffrance partout où elle passe. Cet esprit inférieur est irrésistiblement attiré par les rythmes mélancoliques et spirituels, que ce soient les chants envoûtants des Gnaouas ou les louanges et invocations sacrées des Aissawa.
Elle est connue sous plusieurs noms : "la Soudanaise", "la Duniaouiya", ou encore "la Masculine". Mais c’est son caractère imprévisible qui marque le plus les esprits. Lors des cérémonies, elle se pare de l'aura des humains et danse avec une rage incontrôlable, laissant derrière elle chaos et désolation, une fureur qui lui vaut parfois le surnom de "Rabbalah".
Il est particulièrement troublant de constater qu’au cours d’un rituel de guérison, lorsqu’une entité inférieure se manifeste à travers le corps du malade, le lieu du rituel devient anormalement chaud. La température dans la maison atteint alors des sommets, pouvant avoisiner les quarante-cinq degrés, tandis que l'air est imprégné d'une forte odeur de soufre, émanant directement du patient. Cette entité, souvent hostile, n'hésite pas à menacer le guérisseur, allant jusqu'à provoquer d'étranges symptômes chez le malade, comme des gonflements au niveau du visage, notamment sur le front et autour des yeux, et parfois même des tentatives d'étranglement.
Au caractère instable et imprévisible, cette entité oscille entre une profonde tristesse et une agitation déconcertante, surtout lorsqu'elle est exposée à certains chants ou incantations spécifiques. Ces mélodies, souvent entonnées par des voix féminines, déclenchent en elle des réactions chaotiques : elle peut éclater de rire, fondre en larmes ou plonger dans une sombre mélancolie.
Ceux qui sont possédés par cet esprit partagent des caractéristiques frappantes : une attirance irrésistible pour la couleur noire, une tendance à sombrer dans la dépression et à attirer la malchance, ainsi qu'un regard souvent voilé de larmes. Pour les adeptes, enveloppés dans l'obscurité, cette teinte renforce leur pouvoir, tandis que pour d'autres, elle symbolise faiblesse et désespoir.